François Chesnel. Photographie © Christian Mariette.
Il fait 3° dehors, et on attend la neige pour cette nuit. Au Conservatoire, au chaud, une batterie trône sur la gauche, imprévue au programme, alors que le chœur de chambre s'installe, dirigé par Jean Louis Barbier.
Le pianiste, François Chesnel, commence seul, le contrebassiste, Bernard Cochin, lui tourne juste les pages des deux partitions d'Éric Whitacre, qui a mis en musique les loufoques Animal Crackers du poète Ogden Nash, et l'incantatoire The city and the sea, de Cummings, dont le dernier poème, I walked the boulevard, évoque comme un blues urbain, dans la rythmique du piano. Superbe. Avec en plus les textes traduits et surtitrés. Le plaisir absolu.
Puis l'ambiance musicale se transforme, Franck Esnouf rejoint ses tambours, et le trio entraîne les chanteurs dans le « Somewhere » de West Side Story.
Nous voilà passés de l'autre côté, ce que confirme la série de chansons, en français, de Anne et Claude Germain. Elle a fait parti des Swingle Singers (dont le leader Ward Swingle, vient de disparaître), avec son mari musicien, et écrit des textes pleins d'humour, un peu à la manière des Double Six, dont lui a fait aussi parti. Mais sans les transcriptions des grands solistes de l'époque. Plutôt l'envie de faire sonner le choeur comme un big band, avec ses diverses voix cuivrées. Et ça fonctionne bien. Une jolie redécouverte.
Suivront Cheek to Cheek, d'Irving Berlin, Never no lament, de Duke Ellington... et d'autres standards des années quarante cinquante. À la reprise du thème du Duke, en rappel, les musiciens feront voler leurs partitions pour retrouver la bonne, dans un grand éclat de rire. Car accompagner un choeur suppose une attention aux arrangements qui bride un peu la spontanéité et l'improvisation. Mais les chanteurs et les musiciens s'amusent, et le public est conquis.
Dehors, il fait 2° maintenant ! Mais ce n'est pas trop difficile de reprendre le vélo quand le swing est là, tout va —pour gagner le théâtre où le premier jazz café, depuis longtemps en ce lieu, vient de commencer.
Mourad Bennhamou, Jeremy Bruger, Raphaël Dever. Photographie © Christian Mariette.
Et ça chauffe dur dans le club bien rempli. Il faut dire que c'est Mourad Bennhamou qui mène un trio d'enfer aux baguettes et aux balais. Jeremy Bruger est au piano et Raphael Dever à la contrebasse. Dix minutes de route pour gagner au moins une décennie, celle des années soixante (Ray Bryant, Cedar Walton...).
Quelques compositions du pianiste, dans l'ambiance choisie, avec des traits rapides ou des ballades mélodiques, des arrangements bien agencés et des impros bien équilibrées entre les trois compères. Un beau duo aussi avec la basse sur Reflections de Monk, pour laisser le batteur se reposer de son long solo, mais il n'en a pas vraiment besoin. Avec son grand sourire nonchalant, il assouplit le temps, le ralentit ou l'accélère comme il veut, et quand il prend les balais, il multiplie les nuances percussives. Un beau trio qui existe en cédé visiblement.
Il fait 1° maintenant ! Un peu de neige fondue, ça ne glisse pas encore, et remonter vers le Chemin Vert réchauffe. Surtout après cette nuit de jazz survoltée ! Et demain matin, tout sera blanc à Caen.
Caen tout blanc. Photograhie © Alain Lambert.
Au conservatoire, prochain concert de jazz le 2 juin avec le Michael Formanek Quintet.
En attendant, au théâtre dès ce samedi le Christophe Leloil new quartet, le 26 février A Love Supreme revisited par le Del Sasso Belmondo big band, et le 7 mars le Samy Thiébault quartet réinterprète les Doors dans le cadre de Focus Jazz.
Toutes les infos sur le site du théâtre.
Sans oublier début février le festival Jazz escales de Ouistreham avec Daniel Givone, Renaud Garcia Fons, Sanseverino, Ana Kap... et des animations des élèves musiciens. Voir sur le site de Jazz à Caen.
Alain Lambert
22 janvier 2015
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