Ibrahim Maalouf, 10 ans de live, Mister Productions 2016.
L'expérience du live avec Ibrahim Maalouf, c'est quelque chose, mêlant la musique orientale, le jazz électrique de Miles, le rock progressif de Led Zep et la présence envoûtante d'un homme-orchestre qui joue, improvise, raconte, et fait chanter ou danser le public avec lui.
Ainsi au Havre, en juillet 2014, au festival Moz'aïque, dans les superbes jardins suspendus au-dessus du port [voir notre chronique], le musicien, soit en retrait avec sa section de trompettes (Youen Le Cam, Martin Saccardy, Yann Martin), multiplie les riffs rutilants, sur le principe des chansons à répondre, soit sur le devant, soliste inouï dans l'univers du jazz, s'élance avec sa trompette à quatre pistons, ondoyant sur les quarts de ton, entre errances mélodiques et chuchotements, comme dans Beirut, avant la fulgurance électrique finale.
Toujours en alternance avec la mélancolie de l'orient blessé, le jeu musical et scénique reste très festif, comme dans un concert rock, avec les solos entre jazz et métal de François Delporte à la guitare. Avec Franck Woeste aux claviers, Laurent David à la basse et Stephane Galland à la batterie, en duo, en trio, à cinq, à huit, pour varier les ambiances musicales.
Le public, très nombreux, est conquis, attentif mais prêt à bouger, à reprendre, à sa demande joyeuse un riff en sifflant, à tenir le rythme en claquant des mains, sur lequel le batteur s'amuse à répondre dans un long solo étourdissant, ou à chanter les thèmes de Beirut ou de Will Soon Be A Woman avec juste les arpèges de guitare et la trompette qui improvise.
Un cédé, avec un dvd, vient de sortir dans lesquels on retrouve les neuf thèmes les plus joués en public depuis dix ans, dont ceux cités précédemment, avec cinq bonus en plus pour la galette vidéo, dont l'étude de concert de Goedicke, exercice classique et virtuose joué en duo avec Franck Woeste à Jazz à Vienne. Ou la longue participation du Bagad du bout du monde au concert de Nantes, très classique aussi, une fois passée l'impro de biniou, et qui n'apporte pas tant musicalement, au-delà de l'ambiance. Surtout l'étonnant Jamal, à Marciac, où un jeune sax soprano se met à improviser dans le public, et les cinq musiciens de l'orchestre trouvent des percus pour l'accompagner jusqu'à la fin du morceau. Et aussi quelques jolies impros du guitariste.
Pour tous les autres titres en commun, on retrouve bien cette fougue du trompettiste emporté par son groupe dont le noyau depuis cinq ans reste stable, sauf le batteur Xavier Rogé remplacé à partir de 2014 par Stéphane Galland. Et Youen Le Cam devenu Youn Kamm entre-temps, l'autre trompette, parfois au biniou... Et emporté par la présence du public, qui lui est plus que vitale, dans Red&black light, Will Soon Be A Woman, Nomade Slang ou Ya Ha La...
Sans oublier les voix de Juliette Gréco sur La Javanaise, ou de la Maîtrise de Paris sur l'intro de True Story, à l'Olympia.
Un livre disque autant pour ceux ayant participé à un concert, que pour les autres ne connaissant que les enregistrements studio. Il existe aussi un coffret en série limitée avec 5 dvd des concerts intégraux, et une clé USB de bonus inédits sur les dix ans.
Alain Lambert
14 novembre 2016
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Lundi 5 Août, 2024