2020 —— Alain Lambert.
Soft Machine, Hidden Details, Roy Babbington (basse), John Marshall (batterie) et John Etheridge (guitare), Theo Travis (saxophones, flûte, clavier), Moonjune Records (2018).
En ces temps de confinement, la sortie des nouveaux disques étant reportée fin mai début juin, on prend le temps de repasser des anciens, certains plus que d'autres, en particulier les Peel Sessions de 1969 de Soft Machine (édition cédé 1990), superbe version live de Third qui débute tambour battant par le Moon In June de Robert Wyatt, encore batteur, et toujours chanteur (j'ai beaucoup réécouté aussi son Comicopera de 2007). Il quittera le groupe un album plus tard, suivi par le saxophoniste Elton Dean, le bassiste Hugh Hopper et enfin le claviériste Mike Ratledge. En 1976, après Bundles parait Softs, le quasi dernier album du groupe. John Etheridge a remplacé Allan Hollworth à la guitare, et joue avec Karl Jenkings aux claviers et hautbois, Roy Babbington à la basse et John Marshall à la batterie.
C'est en relisant sur la toile toute cette généalogie de musiciens attachés à l'école du rock progressif dite de Canterbury (Caravan, Camel, Gong, Matching Mole, Egg...) qu'est apparu un nouveau Soft Machine, publié il ya un peu plus d'un an par un label new-yorkais, le bien nommé MoonJune Music, bientôt 20 ans et cent albums parus, où l'on trouve aussi tous les opus, une dizaine, des anciens musiciens de SM enregistrés au xxie siècle. En particulier ceux parus sous le nom de Soft Machine Legacy (héritage) durant ces deux décennies, autour principalement du trio Etheridge, Babbington, Marshall de Softs, auquel s'est adjoint le saxophoniste, flutiste et claviériste Theo Travis, qui a joué avec Robert Fripp et Gong.
Cinquante ans après les premiers enregistrements et quarante ans après l'occultation du groupe, Hidden Details est une belle surprise. Les quatre musiciens ont pris suffisamment d'assurance pour abandonner Legacy et redevenir Soft Machine. Ce nouveau filon du jazz progressif repose principalement sur des compositions nouvelles, sauf deux thèmes anciens, un de Bundles, The Man Who Wawed At Trains et un autre de Third, Old Bloody Rageous. Le titre éponyme ouvre l'album sur une intro de guitare râpeuse qui n'est pas sans rappeler les claviers saturés de Mike Ratledge. Basse et batterie propulsent tout au long de l'album et sans faiblir le sax ample ou la guitare en fusion. Si les morceaux à la flûte sont plus méditatifs, la guitare devient plus acoustique ou atmosphérique, et les paysages musicaux se transforment au fil des plages pour notre plus grand plaisir.
Quant au label MoonJune, il vient en fait de sortir son 101e album, le duo du pianiste Gary Husband et du guitariste Markus Reuteur qui ont enregistré Music Of Our Times à Tokyo au début du confinement ayant stoppé leur tournée au Japon. Grand piano, guitare tactile et électronique, des ambiances contemplatives déclinées en six mouvements intenses. Ces deux musiciens ont publié l'an dernier sur le même label des albums plus jazz rock, Gary Husband avec le guitariste Mark Wingfield pourTor & Vale. Et Markus Reuter en trio pour Truce. À écouter sans modération.
Alain Lambert
7 mai 2020
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