Michel Rusquet, Trois siècles de musique instrumentale : un parcours découverte —— Les œuvres pour piano seul de Franz liszt
Les études ; Les rhapsodies ; Les années de Pèlerinage ; Harmonies poétiques et religieuses ; Consolations ; Apparitions.
Modeste par ses dimensions (six pièces brèves) ainsi que par son niveau d’exigence technique (à la portée du pianiste amateur, du moins les cinq premières), cet autre recueil d’inspiration poétique l’est beaucoup moins au plan de l’intérêt musical. « Écrites en 1849-1850, elles prennent leur source, et leur titre « Consolations », dans un recueil de poèmes de Sainte-Beuve publiés en 1830 et dédiés à Victor Hugo. Des poèmes dont l’atmosphère de mélancolie et de confidence ne put à l’époque que séduire un jeune musicien en proie au mal de vivre ambiant. Vingt ans après, dans le havre que Liszt s’est trouvé à Weimar, « ces six pièces reflètent des incertitudes, des mélancolies, des chagrins (persuadons-nous que la disparition de Chopin n’en est pas le moindre), des bouffées d’espoir ; ce sont des chants de l’âme, un dialogue intime avec soi-même, entre crépuscule et nuit. Il est regrettable que la plus connue, la troisième, ait tiré à elle toute la renommée… »35
En vérité, on ne devrait pas dissocier ces six miniatures au style presque schumannien qui, entre les tonalités de mi majeur (les deux premières et les deux dernières) et de ré bémol majeur (les deux autres), distillent des humeurs très différentes. L’andante con moto initial, avec son écriture en accords, est une pièce méditative qui sert en même temps à introduire la deuxième pièce (poco più mosso), toute de fluidité souriante avec son calme mouvement d’arpèges. La troisième (lento placido), qui est passée entre toutes les mains, évoque le souvenir des premiers nocturnes romantiques, mais paré d’harmonies qui ne sont pas du premier venu.
Franz Liszt, Six consolations, no 3, par Alice Sara Ott, 2010.Avec son air de marche presque cérémonielle, la quatrième (quasi adagio) rappelle un peu la première, mais, « toute en lents accords, elle respire l’odeur d’un cantique, même si quelques incises, quelques accents peuvent sembler plus profanes »36 Mystérieuse en son début, la cinquième (andantino) exhale par la suite « une espèce d’innocence ardente et d’aspiration à la joie »37 qui ne fera que se confirmer dans la dernière pièce (allegretto sempre cantabile), la seule du cycle à adopter des accents passionnés, la seule aussi à faire preuve d’un certain éclat.
Franz Liszt, Six consolations, no 6, par Sviatoslav Richter, concert public en 1986.Franz Liszt, Six consolations, par Sergio Fiorentino , 1963.
35. Sacre Guy, La Musique de piano, Robert Laffont, Paris 1998, p. 1703.
36. Ibid., p. 1704.
37. Ibid., p. 1704.
Michel Rusquet
20 janvier 2021
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