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11 juin 2024 — Frédéric Norac

Du beau, du bon, du vrai Mozart

Marina Viotti

Mezzo Mozart, Marina Viotti, Gli Angeli Genève, sous la direction de Stephen Macleod, Cosi fan tutte ; Concert Aria K.505 ; Le Nozze di Figaro ; Mitridate, Re di Ponto ; Ascanio in Alba ; Exsultate Jubilate, K.165, La Finta Giardiniera, La Clemenza di Tito ; Laudamus Te (Messe en do mineur), Aparté 2024 (AP 350).

Enregistré en juin 2023.

Marina Viotti appartient à cette catégorie de mezzo-sopranos que l’on pourrait qualifier de « second » soprano (ou soprano II). Sa longue tessiture, d’un bas médium nourri à un registre aigu très étendu, lui ouvre les portes d’un large répertoire qui va du mezzo pur au soprano central. Dans ce disque qu’elle consacre à Mozart, elle est ainsi tout à la fois Susanna et Cherubino des Noces de Figaro. Elle est également Dorabella de Cosi fan tutte, l’air qui ouvre ce récital où peut-être manquent un peu de rondeur et de substance. Mais c’est surtout dans le registre seria, celui des rôles originellement écrits pour des castrats (dont on sait la spectaculaire étendue vocale) qu’elle trouve son terrain d’élection. Là, son timbre, sa capacité à unifier les registres, à varier les couleurs, à assumer la vocalise s’épanouissent pleinement. On reconnaît ses origines belcantistes dans ce Mozart d’obédience italienne, mais curieusement c’est dans les airs postérieurs, ceux des Noces qu’elle joue la carte de discrètes cadences. L’air de Farnace de Mitridate, plein de caractère, concrétise cette adéquation de façon spectaculaire, avec une force de projection, une articulation expressive dans le récitatif que l’on retrouve dans Ascanio in Alba et dans la Clémence de Titus ainsi que dans l’air de Ramiro de La Finta Giardiniera. Elle sait également transmettre la spiritualité de l’Exsultate Jubilate, un motet écrit pour le castrat Venanzio Rauzzini, qui avait créé le rôle de Cecilio dans Lucio Silla ou la profondeur du « Laudamus te » de la Messe en do mineur. Sa musicalité reste la même dans toutes les parties du programme et leur donne son unité, mais sa personnalité se démultiplie au fil des rôles abordés. Le célèbre air de concert « Ch’io mi scordi di te » complète ce panorama très riche d’une bonne heure. Sebastian Wienand, qui l’y accompagne au pianoforte, dirige l’orchestre Gli Angeli Genève avec des tempi rapides et nerveux qui conviennent bien au style d’interprétation sur instruments anciens. Ce qui pourrait n’être qu’une mosaïque d’airs devient un véritable parcours et la démonstration d’un talent unique et captivant dans sa versatilité. La couverture du disque nous présente le dos nu d’une femme. Est-ce celui de la cantatrice et l’ange entre Mélancolisa et ange déchu) qu’elle a tatoué sur l’épaule est-il bien réel ou est-ce un clin d’œil à l’ensemble qui l’accompagne ? La notice du livret ne le dit pas. On y verra sans doute une façon de s’inscrire dans l’air du temps et une volonté de rompre les codes et d’attirer un public plus pop.

plume_07 Frédéric Norac
11 juin 2024
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