Le concert secret des Dames à Caen Photo Patricia Segretinat.
Inspiré des concerts secrets de la cour de Ferrare à la fin du xvie, où Alfonso II y fait jouer pour ses invités choisis trois chanteuses et musiciennes, les Dames de Ferrare. On leur composa des madrigaux, et Luzzasco Luzzaschi, élève de Frescobaldi, en écrivit douze livres dont il ne reste qu’un, car le Duc interdisait toute publication. Au xviie, les couvents de femmes à Rome, à Venise ou à Paris connaissaient une vie musicale riche et intense, mais les voix féminines n’ayant pas accès au chœur restaient cachées en retrait, ajoutant au mystère.
Le concert de l’Ensemble Correspondances, pour la quatrième fois cette année au théâtre de Caen où il est en résidence depuis 2016, nous les fait redécouvrir en quatre étapes, d’abord à Ferrare, puis à Rome, avant le couvent de Montmartre et la maison royale de Saint-Cyr. Plus en rappel un motet venu de Venise.
Sébastien Daucé, à la direction, au virginal et à l’orgue positif, nous explique toute cette histoire musicale peu connue qu’il défriche et redécouvre avec son ensemble à géométrie variable. Ici, Etienne Floutier est au-dessus de viole et à la lirone, Angélique Mavillon à la harpe, et Gabriel Rignot au théorbe au long col. Eva Plouvier, Marie Frédérique Girod, Maud Haering et Caroline Bardot sont aux voix de dessus, Arianne Le Fournis et Madeleine Bazola aux voix de bas dessus. Pour des œuvres de Lodovico Agostini, Luzzasco Luzzaschi, Girolamo Frescobaldi, Francesco Biancardi, Giuseppe Gamberti, Etienne Moulinié, et Antoine Boesset.
Et c’est un splendide concert vocal qui nous est offert, mêlé de quelques pièces instrumentales, nous faisant voyager en ce dix septième siècle où les madrigaux profanes et les motets religieux prolongent la polyphonie renaissance en parallèle au déploiement de l’opéra, dont on sent l’influence des voix individuelles dans le Miserere de Nicolas Clérambault, écrit pour les demoiselles de Saint-Cyr. Quand les chanteuses arrivent au début, trois par trois de l’arrière des foyers où le concert a lieu dans une intimité plus profonde, l’effet de surprise et de sublime est vraiment très intense.
À découvrir encore aux Andelys le 30 juin, au prieuré de Vivoin le 6 juillet et au château d’Ancy le Franc le 7 juillet.
À suivre au théâtre de Caen Le carnaval baroque le 29 et 30 mai avec le Poème harmonique.
Alain Lambert
2024
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Samedi 11 Mai, 2024 16:15