25 décembre 2015, par Jean-Marc Warszawski ——

Alle Guerre d'amore : musique et culture de belle beauté

Alle Guerre d'amore, œuvres de Gianvincenzo Cresta et du xviie siècle : Christophe Desjardins (alto), Caroline Pelon (soprano), Raphaële Kennedy (soprano), Ensemble Amoroso, Guido Balestracci (direction). Digressione music 2015 (DCTT 42).

Voici un merveilleux enregistrement à l'humeur introspective, parfois dansante aux accents populaires (qui rappelle là un peu le cheminement actuel de l'Arpegigata de Christina Pluhar), mêlant des madrigaux, chansons, danses de la première moitié xviie siècle, de Domenico Mazzocchi (1592-1665), Sigismondo India (1582-1629), Luzzasco Luzzaschi (1545-1607), Tarquino Merula (1595-1666) plus quelques autres, avec des pièces contemporaines de Gianfranco Cresta, un ciseleur des sons né en 1968, l'une des meilleures années de toutes les ères. C'est la continuation et l'approfondissement d'une expérience qui nous avait donné Amore contraffatto, un enregistrement d'œuvres de Carlo Gesualdo et de Gianvincenzo Cresta (un son qui nous est rappelé dès la première plage), avec l'Ensemble XXI, sous la direction de Rachid Safir, Christophe Desjardins à l'alto, que l'on retrouve ici en compagnie de l'Ensemble Amoroso dirigé par Guido Balestracci, et des sopranos Caroline Pelon et Raphaële Kennedy.

Giocchino De Padova, écrit que l'exercice de l'histoire de la musique, bien qu'il se déroule sur le terrain apparemment ordonné de la chronologie, se traduit souvent en explications qui restent en deçà des œuvres musicales : à chaque moment du passé historique sont arrivés des musiques tellement différences entre elles qu'aucune historiographie ne pourra jamais en éclairer le sens commun.

Oui et non, car l'historiographie n'est pas que chronologie et géopolitique, elle s'occupe des choses de longue durée, qui peuvent disparaître, resurgir, circuler, de la pensée, de l'imagination et des réalisations des individus du passé dans ce qu'elles ont de spécifique. Certes, la musicologie qui occupe le terrain en est encore à la vieille histoire des princes et des batailles, du positivisme et du mémoriel. Cela changera certainement avant la fin du monde.

Mais sincèrement quel pourrait être l'intérêt pour l'artiste de se faire historien ou gardien de musée, d'être mort avant d'avoir manipulé, truqué, illusionné et cherché à offrir de beaux objets esthétiques qu'il souhaite intemporels, à la jouissance collective ? Il n'est pas question d'histoire de la musique, mais de culture de la beauté et de l'émotion, dans lequel ce cédé s'inscrit en plein, mêlant les idiomes de la musique dite contemporaine atonale à ceux tout aussi contemporains institués par les baroqueux et leur musique à peine tonale, avec en prime expérience vocale exceptionnelle.

Jean-Marc Warszawski
25 décembre 2015
© musicologie.org

Gianvinvenzo Cresta, T'ho cercato (plage 1)

Tarquino Merula, Su la cetra amorosa (plage 8)

Christophe Desjardins (alto), Caroline Pelon (soprano), Raphaële Kennedy (soprano), Ensemble l'Amoroso, Guido Balestracci (direction)

Esmé de Vries (viole de gambe), Gioacchino De Padova (viole de gambe), Massimo Moscardo (théorbe), Joël Grare (percussions).

1. Gianvincenzo Cresta, T'ho cercato
2. Luzzasco Luzzaschi, Cormio deh non languire
3. Gianvincenzo Cresta, Il tempo del canto
4. Sigismondo d'india, Alla guerra. alla guerra d'amore
5. Salomone Rossi, Correnta quarta
6. Giovanni Girolamo Kapsberger, Sonino
7. Gianvincenzo Cresta, Come vagabonda
8. Tarquinio Merula, Su la cetra amorosa
9. Gianvincenzo Cresta, Corne sigillo
10. Claudio Monteverdi, Ohimè dov'è il mio ben
11. Giovanni Girolamo Kapsberger, Toccata II, arpeggiata
12. Gianvincenzo Cresta, Apri la porta
13. Sigismondo d'india, CrudAmarilli
14. Domenico Mazzocchi, Chiudesti i lumi
15. Jacques Arcadelt, Il bianco e dolce cigno
16. Gianvincenzo Cresta, Aisuoiocchi

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