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Caen le 16 février 2024 —— Alain Lambert.

Horace McCoy On achève bien les chevaux en théâtre dansé

On achève bien les chevaux. photographie © Agathe Parisot.

Publié en 1935 aux États-Unis, le roman d'Horace Mc Coy, popularisé par le film de Sydney Pollack en 1969 avec Jane Fonda et Michael Sarrazin, reste une référence du roman noir américain, presque un siècle plus tard, sans intrigue alambiquée, juste le réel saisit dans sa plus sombre dimension.

Dans une Amérique en pleine dépression, les plus pauvres s'inscrivent dans des marathons de danse dans l'espoir de toucher la prime au gagnant, et de manger quelques sandwichs pendant les semaines que peut durer ce spectacle, s'ils ne sont pas éliminés. Les spectateurs de ces jeux du cirque ne sont pas forcément beaucoup plus riches que les pauvres danseurs, juste un cran au-dessus, suffisamment pour s'abreuver de la souffrance des autres. Et le fait de se retrouver dans la salle du théâtre de Caen avec sur scène de vrais danseurs acteurs pourrait nous mettre dans cette situation de voyeurs sadiques, même si nous savons que ce n'est que du jeu théâtral. Faut-il applaudir ou pas aux injonctions d'e l'animateur, telle est la question.

Le principe du roman se prête très bien au spectacle global recherché par les trois metteurs en scène et chorégraphes : Bruno Bouché, directeur artistique du CNN Ballet de l'Opéra national du Rhin, basé à Mulhouse ; Clément Hervieu Léger et Daniel San Pedro, directeurs de la Compagnie des Petits Champs basée dans l'Eure. Et leurs trente-deux danseuses et danseurs, neuf comédiennes et comédiens et quatre musiciens. Plus une chanteuse sur une courte séquence.

Sur l'estrade, un batteur David Paycha, un contrebassiste-guitariste M'hammed El Menjra, un pianiste Maxime Georges et Noé Codjia à la trompette, capables de tout jouer, entre la variété, la pop et le jazz, tout ce qui peut faire mouvoir les danseurs. Donner le rythme et aussi la couleur musicale qui convient le mieux au moment. En particulier ce long blues de Charles Mingus, Nostalgia in Times Square, avec sa belle impro de bugle, en disait long sur le désespoir ambiant vers la fin de la pièce.

Quelques scènes de théâtre pour mettre en place, relancer, préciser le temps et les enjeux, quelques autres où l'on entend penser le ou la concurrente quand tout est figé en arrêt sur image. Mais le reste du temps place à la danse et au mouvement, car les corps ne doivent jamais cesser de bouger, en dehors des courtes pauses prévues et attendues par toutes et tous. Avec aussi parfois des défis, deux courses autour de la piste avec des portés qui font gagner des points. Toutes les figures de la danse populaire urbaine y passent. Sauf une fois, au milieu d'un temps de repos, quand une des participantes enfile un tutu et des pointes, et accompagnée par le seul pianiste, nous plonge dans un solo classique quasi onirique, calme et digne, à l'opposé de ce qu'ils vivent maintenant.

Le final aurait peut être dû être suivi d'un plus long silence nocturne, avant le retour des acteurs pour les applaudissements, difficile à éviter au théâtre, contrairement au cinéma ou au livre où l'on reste sur cette dernière scène qui se prolonge à l'infini.

Un beau spectacle troublant à découvrir encore à Mulhouse du 7 au 10mars, à Strasbourg du 2 au 7avril et à Amiens les 11 et 12 avril.

Prochain spectacle total au théâtre de Caen avec La force qui ravage tout de David Lescot du 21 au 23 février.

Alain Lambert
caen, 16 février 2024
© musicologie.org


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