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Ballet du Grand Théâtre de Genève : ombres et lumières à Caen

 

Le Ballet du Grand Théâtre de Genève dans Lux/Glory au Théâtre de Caen, 11 mars 2016.

12 mars 2016, par Alain Lambert ——

« Lux » puis « Glory », mais dans quel ordre ? La résurrection « heureuse » du premier ballet, pour reprendre l'adjectif de Fauré à propos de la mort (une délivrance heureuse, une aspiration au bonheur d'au-delà) reste souvent dans une clarté ombreuse, alors que le suivant, sur des musiques de Haendel entrecoupées de séquences électroacoustiques chantées de Julien Tarride, fait exploser les lumières et les corps.

Ballet de Genève. Lux. Photograhie © D.R.

« Lux » donc, du chorégraphe  Ken Ossala, joue magnifiquement la partition du Requiem de Fauré, et le met en lumière, en clair obscur, après un prélude où les 22 corps du ballet sont étendus, inertes, sur la scène. Comme un lointain clin d'oeil au Béjart du Ballet for life, et aux suaires du premier tableau. Mais là où Béjart privilégiait presque constamment le collectif, Ossala fait alterner, parfois en simultané, les pas de trois, de deux, de quatre, allant jusqu'à onze, les autres danseurs ne faisant que passer, s'ajouter, disparaître, avant de s'aligner dos tournés côté cour, en esquissant des gestes un peu spasmodiques, dans le manque d'espace ou quand les mouvements se gênent.

Un travail sur les corps à peine voilés par un simple short, et un haut transparent imprimé qui fait penser parfois à des tatoués, parfois à des écorchés. Les musculatures n'en ressortent que mieux dans ce retour à la vie qui ne peut être que dansée, sur fond d'orgue, de voix graves ou légères, et de cuivres profonds.

Avec « Glory » de Adonis Foniadakis, pas de gisants ni de pesanteur ni d'écorchés, tout va vite. Les corps, quand ils ne sont pas de simples ombres lointaines, s'entremêlent en ondulant dans un chassé-croisé permanent. Ils surgissent du néant, franchissent une marche de lumière, caracolent dans des habits différents à chaque apparition. Longue jupe légère pour les hommes et les femmes comme dans les arts martiaux orientaux. Noir, rouge ou couleur chair, justaucorps bicolore devant derrière qui donne l'impression, en se retournant, d'une autre danseuse...

Balle de Genève, Glory. Photographie © D.R.

Les interludes de musique très contemporaine donnent le ton, la danse le sera aussi. Pas de pavanes ni de  menuets, quand la musique d'Haendel s'installe. On les attendrait presque, et si les  danseurs  esquissent une figure ancienne, les voilà déjà partis, glissant de l'un à l'autre, s'arquant, se culbutant, s'agrégeant avant de pivoter et de s'enfuir. Un moment plus théâtral, tout en noir, avec la grande traîne de la danseuse, mouvante et déployée par les perches des danseurs, leur permet de se poser un peu, le temps d'un intermède.

Le final collectif et chaotique sur l'alléluia du Messie ne conclut pas le spectacle, même s'il ressemble à un bouquet de feu d'artifice. C'est le fameux largo superbement chorégraphié dans sa sublime nostalgie qui voit  le rideau tomber et éteindre toutes les lumières.

Deux chorégraphies très différentes dans leur beauté fugitive, enrichie par les performances et la fougue des excellents danseurs du Ballet du Grand Théâtre de Genève

 Alain Lambert
12 mars 2016

 


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