Le festival PAN ! : un panorama des jazz pas banal !

Caen, 23 et 24 septembre 2016, par Alain Lambert ——.

PAN ! 4^e édition, la dernière à la Fermeture éclair sur le port de Caen, un ancien garage qui va disparaître dans le grand chantier de la presqu'île, avant de rouvrir ailleurs... En attendant, la scène à peine surélevée retrouve l'ambiance cabaret de l'an passé, avec des musiciens très proches du public, venu nombreux sur les deux jours.

Betty et les garçons au PAN ! festival à Caen.

Un atelier du conservatoire de Caen ouvre le festival, où la voix de Betty Jardin, bien connue des jams locales, est joliment mise en valeur par les quatre musiciens qui l'accompagnent. Un futur groupe en puissance sans doute !

Le duo Zafaroud au PAN ! festival à Caen. Photographie © Christian Mariette.

Le duo Zafaroud, Yacir Rami à l'oud et Antoine Morineau aux percussions multiples, propose un voyage en Modalie, le pays de leur cédé [voir notre chronique], mais ici, le oudiste s'aventure à chanter en public pour la première fois, d'une voix profonde et nostalgique. Il utilise aussi ses pédales pour faire entendre un tampura indien ou créer une ligne de basse en boucle, pendant que les doigts percussifs de son complice s'adaptent finement à chaque étape improvisée.

Shauli Einav 4tet au PAN ! festival à Caen. Photographie © Christian Mariette.

Avec Shauli Einav, le jazz moderne, mâtiné des influences musicales de Prokofiev [voir notre chronique], s'épanche sous le souffle tourmenté du saxophoniste, d'abord au soprano, puis au ténor. Superbement soutenu par un Paul Lay impétueux au piano. Et sans que Florent Nisse à la contrebasse et Gauthier Garrigue à la batterie ne manquent de place pour exister pleinement.

Skulltone duo au PAN ! festival à Caen. Photographie © Christian Mariette.

Le dernier voyage de la soirée est plus rock expérimental, avec un duo détonnant, Skulltone. Fanny Lasfargues est à la basse, Emmanuel Scarpa à la batterie. Tous deux manient l'électronique et s'amusent à chanter en choeur, de façon décalée, comme s'ils accompagnaient une voix principale évanouie depuis longtemps. Mais qui enchante bien leur jeu minimaliste et percutant.

Le samedi commence dans la cour, sous le soleil d'été, où les deux comédiens de l'« Ultime goutte » [voir notre chronique] jouent en équilibre sur le rire, parfois jaune, et l'émotion. Vive le FLBC !

Hornstrom au PAN ! festival à Caen. Photographie © Christian Mariette.

Puis Hornstrom investit la salle, venu de Cologne, composé aux trombones de Tobias Wember et Klaus Heidenreich, à la contrebasse de Markus Braun et à la batterie de Silvio Morger. Une géométrie improbable à l'origine d'une musique originale, entre chorus et choral, où la section rythmique rehausse les impros très vocales des deux trombones.

Magnetic Orchestra au PAN ! festival à Caen. Photographie © Christian Mariette.

Magnetic Orchestra, c'est François Gallix à la contrebasse, Nicolas Serret à la batterie, Benoit Thevenot au piano, tous trois déguisés au début grâce à la garde-robe théâtrale d'Amavada. Un power trio débridé, plus encore que dans leur cédé Now [chronique à venir]. À tel point que Nono au son est un brin perturbé, c'est peu dire. Le pot pourri de tubes de variété au final est un régal, avec Caravan en bonus et en point d'exclamation !

Entre chaque set, la Radio Bazarnaom, qui diffuse en live sur le net grâce à Rémi (la famille lointaine de Zafaroud a pu les écouter), propose aussi des interludes, souvent très drôles, avec Émilie (Michelle Jackson...), Romuald (speaker sportif effréné ...), et de nombreux comédiens amateurs comme les impayables Fakir Hussen ou Quincy Love Jones...

Changement de décor avec Tournez Nadège, un trio libertaire venu de Tours, bien évidemment. De longues séquences improvisées sur le principe du collage et de l'association d'idées sonores et musicales. Thomas Leuwers, à la guitare, peut passer des arpèges frangés à l'orage sans prévenir, Alexis Heropoulos peut souffler dans son ténor sans s'essouffler. Matthieu Desbordes, lui, peut chanter les mains dans la farine tout en battant le free tant qu'il est chaud.

Pour le final pas banal, il faut ranger les chaises pour accueillir l'Impérial Orphéon, un quatuor électro musette sous theremin, avec une once de bel canto. Rémy Poulakis à l' accordéon, au chant lyrique, Gérald Chevillon au saxophones basse, Damien Sabatier au saxophones alto ou au theremin (l'ancêtre russe en 1919 du synthé, dix ans avant Martenot), Antonin Leymarie à la batterie. Une réelle virtuosité à déjouer les tubes du baluche pour faire danser le public, ravi.

Merci à Christian Mariette pour les photos auxquelles on peut accéder par le lien suivant : Festival PAN 2016

Alain Lambert
27 septembre 2016