musicologie

7 décembre 2023 —— Michaël Sebaoun.

Le compositeur Denis Levaillant dans ses cordes

Denis Levaillant, Le voyage immobile, œuvres pour cordes et accordéon : Quatuor Varèse, quatuor Amôn, Quatuor Joachim, Quatuor Arpeggione, Trio Varèse, Pierre Lenert (alto), Jean-Philippe Audin (violoncelle), Alexis Descharmes (violoncelle), Sébastien Surel (violon), Olivier Innocenti (accordéon). Médiabook 2023 (2 CD DLM 3422).

« C’est à un voyage imaginaire que nous sommes conviés », écrit le compositeur Jean-Yves Bosseur, dans la notice du double CD d’œuvres pour cordes et accordéon, Le Voyage immobile, du compositeur français Denis Levaillant (né en 1952). Un voyage en forme de narration, épousant le parcours des Tsiganes depuis l’Inde du Nord jusqu’en Andalousie.

Un mystérieux chemin, pour alto solo, s’inscrit dans le sillage revendiqué et limpide de la Sonate pour alto (du premier mouvement surtout) de Ligeti. Il aborde notamment la tessiture grave de l’alto, les micro-intervalles, et le jeu sur la touche.

Un voyage tsigane, pour quatuor à cordes, révèle l’appropriation, passée au filtre de la sensibilité du compositeur, de la musique tsigane ; le quatuor ne s’épanche qu’au travers d’un lyrisme rentré (l’oxymore du titre de l’album est ainsi pleinement justifié), tandis qu’Armenian Gypsy, brève pièce pour violoncelle solo, s’apparente à un méditatif chant populaire arménien « imitant » le jeu du duduk.

L’accordéon et le quatuor à cordes fusionnent admirablement dans L’Andalouse, livres 1 et 2, comprenant quatre parties statiques aux allures de métamorphoses nocturnes, et s’épanouissant dans un cinquième mouvement où le rythme joue un « rôle de structuration de la forme ».

Conçues initialement comme une musique « de ballet », Les Heures défaites est le premier quatuor à cordes de Denis Levaillant et témoigne du goût du compositeur pour les passerelles entre les différentes fonctions d’une même œuvre. On s’immerge ici dans une pure et riche écriture pour quatuor à cordes « de concert ».

Le Clair, l’obscur…est le deuxième quatuor à cordes du compositeur. Le titre, explique le musicologue Pierre Michel, est extensible : clair et obscur, mais aussi douceur et violence, sourd et brillant… Vingt-quatre tonalités seront effleurées, poursuit le musicologue, qui attestent la volonté d’expression du compositeur, et une attirance pour les « types d’écritures anciens ».

Les grandes tenues de L’Intime, Trio à cordes N° 1 évoquent parfois les sonorités… d’un accordéon. Le Trio s’autorise des lenteurs schubertiennes, avant Trois Derviches, un deuxième Trio à cordes désincarné, sorte de toile abstraite à l’espace distendu.

Le Quatuor Varèse, le Quatuor Amôn, le Quatuor Joachim, le Quatuor Arpeggione, le Trio Varèse, l’altiste Pierre Lenert, les violoncellistes Jean-Philippe Audin et Alexis Descharmes, le violoniste Sébastien Surel, l’accordéoniste Olivier Innocenti accompagnent merveilleusement Denis Levaillant dans cette très belle épopée intime.

  Michaël Sebaoun
7 décembre 2023
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Vendredi 8 Décembre, 2023 11:37