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21 et 22 septembre 2013, par Alain Lambert ——

« Pan Festival » IMEC  Abbaye d'Ardenne Saint-Germain-la-Blanche-Herbe

Première édition (après quinze ans à Maizet puis Varembert) du festival d'automne du Collectif Jazz de Basse Normandie, dans le cadre prestigieux, cette fois, de l'Abbaye d'Ardenne, aux portes de Caen. Et de l'IMEC, Institut Mémoires de l'édition contemporaine, qui y occupe les lieux depuis une quinzaine d'années.

abbaye d'ArdenneL'abbaye d'Ardenne abritant l'IMEC près de Caen.

Un festival sur deux jours, mêlant jazz, musique contemporaine, exposition, performances poétique ou photographique avec l'IMEC, atelier hip hop avec la MJC du Chemin Vert à Caen, et théâtre pour enfants. Sans oublier dans cet inventaire un solo de cornemuse et un lapon raveur.

Le samedi, après le vernissage de l'expo, le One Time trio débute, très classique, malgré le piano Fender, histoire de chauffer l'oreille des spectateurs, celle qui sert d'emblème, sur l'affiche. Jeremy Burger, Thibault Renou à la contrebasse et Pascal Vigier à la batterie, la section rythmique du « Bibendum Orchestra » [voir notre chronique] ont eu l'idée d'inviter un trompettiste, un sax alto anglais installé dans le coin, et un tout jeune guitariste de 14 ans, Tom, venu du Pays d'Auge, avec le swing au bout des doigts, en particulier sur Saint Thomas.

One time trioOne Time  trio plus et invités à l'IMEC. Photographie © Éric Martin.

Musique et performance contemporaines ensuite : un diaporama précédé d'une lecture d'un texte sur 1974 et de diapos de voyage du chef d'orchestre, lié à la mouvance spectrale, Boris de Vinogradov, dont les archives sont conservées à l'IMEC justement. Photos érodées, parasitées par le temps, comme nos souvenirs et les images de nos multiples mémoires. Un beau travail mélancolique  du plasticien (archiviste) Julien Sirjacq, sur fond de vagues électroniques (Étienne Bonhomme) et de mugissements de clarinette basse (Laurent Bruttin) de la pièce Nout (1983) de Gérard Grisey, pas si éloignée du rock allemand dont il était question au début du journal musical de l'année 1974.

Un trio inspiré ensuite, avec Loïc Réchard à la guitare, son frère Ivan aux deux basses et Laurent Lao à la batterie. Très complice, énergique et coloré, aussi à l'aise sur les thèmes de Pat Metheny, que sur ceux de Monk, Bahia et surtout Evidence, ce qui n'en est pas une à transposer pour la guitare.

Loic Richard Loïc Rechard et l'une de ses guitares.

Place à la danse contemporaine, dans ce programme éclectique et intriguant. A partir du vocabulaire de base du hip hop, Brice Bernier propose toute une gestuelle élaborée, dans une mise en mouvement décalée, stroboscopée et heurtée. Très en phase avec le traitement électronique et rythmique du batteur Kevin dit K20. On verra dimanche avec intérêt ce que leur travail avec les jeunes caennais a pu donner.

Brice BernierBrice Bernier en lévitation.

Le trio suédois Fire clôt la soirée, alternant séquences répétitives, techno ou free, entre une basse minimale (Johan Berthling) et une batterie pilonnée (Andréas Werliin), pendant lesquelles le saxophoniste Mats Gustafsson s'acharne sur ses générateurs de son comme sur son baryton, avant de trouver un son presque coltranien sur son ténor, un peu apaisé.

FireLe trio suédois Fire.Photographie © Johan Dahlroth.

Le dimanche après-midi, la danse est de nouveau à l'honneur avec « Nameless Crew », la troupe de jeunes venue de la MJC du Chemin vert, un quartier limitrophe de la grande ville. Depuis mardi, Brice et K20 les ont aidés à élargir leur spectacle annuel.  Un moment très dynamique et joyeux, avec un clin d'oeil au festival dans l'avant final, quand la musique devient presque jazz rock, permettant d'autres ouvertures à la danse de rue, plutôt à l'aise dans ce décor prestigieux. Un beau symbole de voisinage pour ce festival.

Nameless crewLes Nameless Crew à l'IMEC. Photographie ©Nabil Moutarou.

Pendant que la jeune troupe refait un bout de danse dans la cour pour une bénévole trop occupée, qui n'a pu les voir sur scène, l'« EP4 » du saxophoniste Éric Prost s'installe dans la Grange aux Dîmes. Un musicien qu'on connaît bien ici puisqu'il participe au « Love Song Quintet » de Jean Benoit Culot [voir notre chronique].

Un beau quartet venu de Mâcon, proposant deux ambiances complémentaires selon que le bassiste Basile Mouton joue acoustique ou électrique. Jazz d'abord, plus pop ensuite, leur musique reste toujours très mélodique, joliment improvisée, bien soutenue par la batterie (Stéphane Foucher), la basse, le sax ténor, le piano Fender (Bruno Puder), et pourtant très sereine.

Eric Prost quartetLe quartette d'Éric Prost.

On pourrait les écouter encore longtemps, mais l'heure tourne. Il faut rejoindre l'ancienne boulangerie pour un concert tout acoustique, improvisé et intimiste, un salon de musique, avec juste une vingtaine de spectateurs, voulu par le contrebassiste Sébastien Boisseau, accompagné du guitariste Manuel Adnot. Avec des échanges sur l'essence de l'improvisation, des exemples, et des morceaux non préparés où la complicité, la technique, l'émulation, l'écoute et l'intuition fonctionnent à merveille.

Le temps de recharger ses batteries au soleil, en flânant dans le magnifique jardin, et le dernier groupe démarre en puissance, sur les bases, justement, d'une musique improvisée à trois, en partant de courtes séquences rythmiques ou mélodiques explorées collectivement, loin des standards, des thèmes ou du swing habituel, mais sans être vraiment free jazz. Plus dans la continuité de la Freedom Suite Plus de Sonny Rollins qui l'a précédé, et retrouve aujourd'hui toutes ses potentialités avec ces nouveaux musiciens. Pour ce trio, le Suédois de Londres Petter Eldh, le sax alto Wanja Slavin et le batteur déphasé Christian Lillinger, tous deux allemands.

One time trio Le Slavin / Eldh / Lillinger trio à l'IMEC. Photographie © Éric Martin.

Une première édition stimulante de ce festival « Pan » à l'IMEC, avec  ses multiples propositions qui ont séduit le public, curieux et nombreux. Un magnifique cadre campagnard bien équipé à proximité de la ville, on ne peut souhaiter mieux pour les années à venir.

Collectif Jazz de Basse-Normandie.

plume Alain Lambert
23 septembre 2013
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